Le Conseil d’Etat avait jugé en juillet 2021 que l’espèce était dans un « état de conservation défavorable. » Les espèces qui restent sur la liste, anciennement liste des nuisibles, peuvent être chassées toute l’année.
Le Monde avec AFP le 04/08/2023
Le putois ne pourra plus être chassé toute l’année. A l’exception de cette espèce, la nouvelle liste, publiée vendredi 4 août par le gouvernement, des « espèces susceptibles d’occasionner des dégâts » (ESOD), autrefois qualifiées de « nuisibles », est quasi identique à celle établie en 2019.
Dans la nouvelle version de cette liste, qui sera valable jusqu’en 2026, la belette, la fouine, la martre, le renard, le corbeau freux, la pie bavarde, le geai des chênes et l’étourneau sansonnet peuvent être « piégés toute l’année » ou « détruits à tir » avec autorisation préfectorale, selon le texte publié au Journal officiel à l’issue d’une consultation publique. Certaines espèces peuvent aussi être « déterrées », c’est-à-dire capturées en détruisant leur terrier.
Ces huit espèces appartiennent au groupe 2 des ESOD, qui en comporte deux autres : l’un concerne les espèces exotiques envahissantes (ragondin, rat musqué…) et l’autre est défini en fonction de spécificités locales (lapin de garenne, pigeon ramier…). Le putois figurait dans ce groupe 2 jusqu’à maintenant, mais à la suite d’une décision du Conseil d’Etat en date de juillet 2021 jugeant l’espèce dans un « état de conservation défavorable », il n’y apparaît plus, comme la précédente secrétaire d’Etat à la biodiversité, Bérangère Couillard, s’y était engagée.
Différentes ONG remettent en cause la légitimité des arrêtés ESOD, jugeant archaïque l’idée d’autoriser à tuer « sans limite » des animaux « dans le contexte de l’urgence écologique et de l’effondrement de la biodiversité », et fustigeant la méthode d’établissement de la liste, qui résulte de simples déclarations ne faisant l’objet d’aucun contrôle, aussi bien sur la véracité des faits que sur l’estimation des dégâts.
Chasses suspendues pour trois espèces « à l’agonie »
« C’est un cadeau fait aux chasseurs, qui reprochent à pas mal d’ESOD de s’en prendre au gibier qu’ils vont relâcher », a aussitôt dénoncé Allain Bougrain-Dubourg, le président de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO). L’association a déposé vendredi un « recours juridique » à ce nouvel arrêté. « On aura une double action en local devant les tribunaux administratifs et d’autre part au niveau national », a annoncé à l’Agence France-Presse (AFP) son président. Il a aussi dénoncé le « mépris avec lequel on traite tous les contributeurs » de la consultation publique, dont 71 % s’étaient opposés au projet d’arrêté.
Le cabinet de la nouvelle secrétaire d’Etat à la biodiversité, Sarah El Haïry, a précisé à l’AFP « vouloir engager une réflexion pour rendre le cadre plus lisible et efficace conformément aux attentes des acteurs ». Une mission de l’inspection générale du ministère est prévue pour « identifier comment font les autres [pays] et pouvoir comparer et alimenter la réflexion collective ».
Le gouvernement a par ailleurs publié vendredi trois arrêtés pour suspendre la chasse de trois espèces d’oiseaux jusqu’à fin juillet 2024 : le courlis cendré, la barge à queue noire et la tourterelle des bois. Il s’agit d’espèces « particulièrement menacées », a fait valoir l’entourage de Sarah El Haïry. « Ces trois arrêtés moratoires s’inscrivent dans la doctrine qui est que lorsque la science nous dit que l’état de l’espèce ne le permet pas, l’Etat ne délivre pas de quotas de chasse et peut prendre des moratoires », a-t-on expliqué de même source.
Mais pour M. Bougrain-Dubourg, cela ne suffit pas : « On donne un an de sursis pour ces espèces qui sont à l’agonie alors qu’au minimum on devrait leur accorder cinq ans de répit pour tenter d’endiguer leur déclin et espérer une renaissance. »
Le Monde avec AFP