La tenue de chasse comporte, outre un treillis de camouflage vert, des accessoires orange fluo. Une particularité liée à la vision animale du gros gibier, qui n’est pas sensible à cette longueur d’onde.
Pourquoi les chasseurs portent-ils des gilets orange fluo en même temps que des imprimés camouflages ? », nous demande Yassin Hajji sur la page Facebook de Sciences et Avenir. Chaque semaine, nous sélectionnons une question que vous vous posez, et y apportons une réponse. Merci pour votre curiosité insatiable ! Il s’agit d’une question qui rappellera peut-être quelques souvenirs aux lycéens en terminale L ou ES : le sujet figurait en effet à leur épreuve anticipée de sciences, en juin 2018. Voici néanmoins une piqûre de rappel pour ceux qui n’ont pas eu cette chance… La tenue orange fluo des chasseurs est en effet intrinsèquement liée à la vision des couleurs par le gibier, et notamment aux types de protéines synthétisées par les photorécepteurs (cônes) de la rétine.
Les opsines, protéines de la vision en couleur
Car côté vision, toutes les espèces ne sont pas logées à la même enseigne ! La vision passe en effet par deux types de photorécepteurs rétiniens : les bâtonnets, impliqués dans la détection des mouvements et la vision nocturne, et les cônes, sensibles aux couleurs. Mais les yeux sont sensibles à plus d’une seule couleur ! La traduction de l’onde lumineuse en un signal électrique interprétable par le cerveau est assurée par des protéines appelées opsines. Or, ces opsines existent sous plusieurs versions distinctes, sensibles à différentes longueurs d’onde. Chez l’homme, on retrouve cette protéine sous trois versions : l’opsine S (pour short), qui présente un maximum d’absorption à 420 nm, soit dans le bleu, l’opsine M (pour middle) qui présente un maximum à 530 nm, soit dans le vert, et enfin l’opsine L (pour long), sensible à l’orange-rouge à environ 560 nm. On parle de trichromatisme (trois couleurs).
Extrait du sujet de sciences du bac ES et L 2018
ÉVOLUTION. Mais toutes les espèces ne disposent pas de la même palette ! Alors que certaines espèces d’oiseaux (par exemple certains passereaux) disposent d’une quatrième opsine supplémentaire les rendant sensibles aux ultraviolets, la plupart des mammifères ne disposent que des versions S et M de la protéine. Le résultat : une vision dichromatique des couleurs, basée sur le bleu et le vert, à l’exclusion des nuances de rouge. C’est le cas de beaucoup de mammifères, dont le sanglier ! Mais pas de certains primates, dont l’homme, à la faveur d’une mutation sur le gène codant l’opsine M, ayant engendrée par duplication un nouveau gène, codant l’opsine L. Cette mutation serait intervenue il y a entre 23 et 40 millions d’années. Autrement dit, si le chasseur sait distinguer l’orangé, ce n’est pas le cas du sanglier, qui le voit comme une couleur terne. Certains mammifères (comme le renne arctique par exemple) sont toutefois également sensibles aux UV, le plus souvent via des mutations génétiques complexes sélectionnées par l’environnement.
Être vu des autres chasseurs… mais pas du sanglier