Des papillons battent le record de la plus longue migration d’insectes

Par Anne-Sophie Tassart le 23.06.2021 à 14h46 Lecture 3 min.

Les Belles-Dames, des papillons, sont capables de parcourir entre 12.000 km et 14.000 km aller-retour, quand les conditions météorologiques le permettent

Lorsqu’elle migre, la Belle-Dame (Vanessa cardui), une espèce de papillon, ne fait pas dans la demi-mesure : elle peut traverser le désert du Sahara pour rejoindre l’Europe, révèle une étude publiée le 29 juin 2021 dans la revue américaine PNAS.

Des données récoltées sur le long terme

Ces papillons sont notamment présents en Afrique subsaharienne. En Europe, leur nombre est très variable d’une année à l’autre. Mais jusqu’à maintenant, ce phénomène n’avait pas d’explication. D’où viennent les papillons présents sur le Vieux-Continent ? Ce peut-il qu’ils soient originaires d’Afrique et qu’ils peinent parfois à migrer ? Les entomologistes savent que la Belle-Dame migre au printemps après la saison de reproduction qui se déroule l’hiver. Pour suivre le mouvement de cette espèce, une équipe internationale de recherche a utilisé les données de surveillance obtenues sur le long terme par des milliers de volontaires. Les biologistes ont également pris en compte les données atmosphériques et climatiques concernant l’Afrique et l’Europe.

Des papillons qui parcourent entre 12.000 et 14.000 kilomètres

C’est donc en combinant plusieurs données que les chercheurs ont réussi à avoir une vision plus précise de la migration des Belles-Dames. Ils en ont déduit que ces papillons sont capables de migrer sur des milliers de kilomètres, traversant le désert du Sahara et la Méditerranée pour rejoindre l’Europe. Ce périple ne s’effectue pas tous les ans mais seulement lorsque les conditions météorologiques le permettent. Les Belles-Dames parcourent alors, aller-retour, entre 12.000 et 14.000 km, volant sans s’arrêter le jour et se reposant tout de même la nuit afin de réussir leur traversée du Sahara. Il s’agit de la migration d’insectes la plus longue connue à ce jour. Mais attention : elle se réalise en plusieurs étapes d’un point de vue démographique. « Le nombre de générations pour l’ensemble du circuit annuel est probablement d’environ 6 à 8 générations, explique à Sciences et Avenir le chercheur chinois Gao Hu, auteur principal de l’étude. Aucun individu ne peut couvrir tout le voyage de migration, la traversée s’effectue donc sur plusieurs générations« .

 

 

Cette carte montre les zones traversées par les Belles-Dames durant leur migration. Crédit : Gao Hu et al

Et ce voyage est possible uniquement lorsque la croissance de la végétation sur le parcours est suffisante, que ce soit dans la savane en hiver ou dans le nord de l’Afrique au printemps, ce qui conduit alors à une période de reproduction supplémentaire juste avant de traverser la Méditerranée. En effet, les plantes, dont le développement est favorisé par un climat humide, permettent alors aux chenilles Vanessa cardui de se nourrir. En outre, des vents entre l’Afrique et l’Europe permettent également la migration transcontinentale des Belles-Dames. Ces dernières volent entre un et trois kilomètres au-dessus du niveau de la mer pour en bénéficier.

Selon les chercheurs, cette étude pourrait les aider à mieux évaluer les mouvements migratoires d’autres insectes et tout particulièrement des espèces invasives capables de mettre à sac les cultures ou d’être des vecteurs d’agents pathogènes.